Rosina Kuhn

Rosina Kuhn, fille du peintre Adolf Funk, est indéniablement une artiste d’expérience. Elle vit et travaille à Zürich mais aussi dans le Mendrisiotto et à Los Angeles. Portraitiste de haut vol, elle a pris pour modèles entre autres des écrivains tels que Laure Wyss, Isolde Schaan ou encore Hugo Loetscher, des personnages politiques également comme Otto Stich ou Rita Fuhrer. Mais si Rosina Kuhn explore depuis des années le visage des êtres, et tout particulièrement leur regard.

On lui doit aussi des cycles de peintures consacrées au torse et au dos humains, traités comme des fragments de paysages organiques. Elle a également abordé le portrait géant, plus abstrait, moins individualisé, brossé à bout de bras à la manière d’une chorégraphie, lavé de couleurs fluides et rapides. Nous citerons la critique d’art Françoise Jaunin qui, parlant de Rosina Kuhn, nous offre quelques clefs de lecture : « Si les thèmes sont traditionnels et le métier classique, le regard et la manière de l’artiste sont bien d’aujourd’hui, même s’ils se réfèrent à deux grands maîtres hors du temps : Balthus et surtout Hodler. Au premier elle rend hommage à travers des figures féminines au regard rêveur et comme absentes au monde pour être totalement présentes à leur propre être intérieur. Du second, elle retrouve cette manière de donner à chaque couleur une qualité précise d’énergie et d’expression, une vibration qui sonne à la fois pour elle-même et à l’intérieur du champ de forces du tableau. »

A elle seule, la trajectoire hors des modes et des courants qui est celle de Rosina Kuhn, méritait qu’on s’y attarde, mais ce qui a retenu l’attention de nos jurés, c’est bien la notion de pas décisif qui, avec le projet présenté cette année à la FEMS, prend ici tout son sens.

Avant tout peintre des visages et du regard, et reconnue en tant que telle, Rosina Kuhn abordera pour la première fois le pur paysage, ce qui dans sa carrière constitue une étape inédite. « Les éléments paysagers n’ont jamais cessé de se manifester dans ma peinture, dit-elle, que ce soit sous la forme de jaillissements colorés comme les grandes toiles new-yorkaises des années 70, les « dos-paysages » des années 80 ou encore les « visages-paysages » des années 90. Je ne me suis essayée au paysage réel que récemment, avec la série d’aquarelles « Sunset Boulevard » réalisée à Los Angeles, mais au format carte postale, faute d’atelier sur place. Cependant, je nourris depuis longtemps l’idée de transposer sur la toile le paysage du Mendrisiotto en traitant sa variété dans toutes ses dimensions, sans en exclure ce qu’on pourrait appeler « le nouveau laid », autoroutes, voies de chemin de fer, centres industriels ou commerciaux. C’est donc en toute impartialité, c’est-à-dire sans nostalgie ni sensiblerie, que je me présenterai devant ces « nouveaux paysages » pour les (re)découvrir… »

Ainsi, Rosina Kuhn réalisera, durant l’année de son Prix, une suite de douze tableaux de grandes dimensions, conçus comme un panorama embrassant les 4 points cardinaux et autant d’horizons géographiques différents, mêlant dans leurs tonalités les quatre moments du jour et les quatre saisons.

Comme le règlement du Prix le spécifie, une publication saluera l’accomplissement de son projet et les œuvres réalisées durant cette année feront l’objet d’une exposition dans l’un des musées de notre région, en fonction des synergies trouvées.